samedi 1 décembre 2018

Pour une taxation des ventes d'armes

Nous avons dit notre scepticisme sur les chances de succès de la taxe Tobin.  L'idée de taxer les exportations d'armes nous semble plus pertinente.  Il s'agirait de taxer ce mal global par excellence qu'est le surarmement en allouant les produits de la taxe à l'ONU et aux organisations qui, avec elle, travaillent avec des moyens beaucoup trop limités à la prévention des conflits.  Rendre plus coûteuses les importations d'armes, c'est contenir l'ardeur des va-t-en guerre.  C'est aussi concourir à l'élimination du scandale de ces trois cent mille garçons et filles de moins de quinze ans qui, sur tous les champs de bataille du monde, utilisent les armes que nous vendons.
Nous connaissons bien les objections à un tel projet.  Comment le G 8, qui exporte 90 % des armes vendues sur le marché mondial, déciderait-il de se taxer lui-même ? Comment identifier ces exportations ? Ces difficultés ne sont pas insurmontables.  Le G 8 sait que l'accumulation des armes dans le tiers-monde est une bombe à retardement dont il peut être à tout moment la victime.  Nous le savions mais, depuis le 11 septembre, c'est une évidence criante.
La taxation est-elle réalisable ? Elle l'est, tout spécialement pour les armes lourdes.  Depuis le sommet de Londres, en 1984, le registre des Nations unies consigne la nature, le montant et la destination des exportations militaires de tout pays exportateur.  L'assiette de la taxation est donc bien identifiée.  Elle ne s'applique pas encore, hélas, aux ventes d'armes légères, et l'on sait que la conférence de l'ONU à ce propos, en juillet 2001, s'est achevée par un échec à la suite de l'opposition de la Chine, de la Russie, mais surtout des États-Unis.  Les Européens ont plaidé, eux, pour le contrôle strict à l'exportation », et même pour la mise en place d'un marquage permanent de ces armes qui tueraient environ cinq cent mille personnes par an.  


On peut penser que la « révision déchirante » de leurs objectifs internationaux, à laquelle les États-Unis procèdent depuis le 11 septembre, permettra de rouvrir cette discussion.
Quelles ressources pourrait-on attendre de cette taxe ? Selon Laurent Fabius, ministre de l'Economie, des Finances et de I'lndustrie, « un prélèvement de 10 % sur les exportations d'armes pourrait représenter chaque année jusqu'à cinq milliards d'euros supplémentaires ». Ce serait un pas vers la réalisation de la parole du prophète Michée, qui nous invitait « à transformer les épées en socs de charrues ».

« Notre Foi dans ce siècle » de Michel ALBERT, Jean BOISSONNAT, Michel CAMDESSUS Ed. Arléa, 2002 p. 171

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