À la limite, elle sape les fondements sociétaux qui rendent possible le fonctionnement du marché lui -même.
L'argent peut être une drogue qui rend esclave |
« Le capitalisme n'a pu fonctionner, notait le philosophe Cornélius Castoriadis, que parce qu'il a hérité d'une série de types anthropologiques qu'il n'a pas, et n'aurait pas pu créer lui-même : des juges incorruptibles, des fonctionnaires intègres et wébériens, des éducateurs qui se consacrent à leur vocation, des ouvriers qui ont un minimum de conscience professionnelle, etc. Ces types ne surgissent pas et ne peuvent pas surgir d'eux-mêmes ; ils ont été créés dans des périodes historiques antérieures, par référence à des valeurs alors consacrées et incontestables : l'honnêteté, le service de l'État, la transmission du savoir, la belle ouvrage, etc. »
Les dérives du modèle anglo-saxon menacent donc aujourd'hui le capitalisme lui-même. C'est l'idée qui émerge, compris y parmi les plus ardents défenseurs de l'économie de marché. Réduite à elle - même, la société de marché est nécessairement de plus en plus anxiogène, parce qu’elle fonctionne uniquement à la drogue du profit. Or la drogue est un désir toujours insatisfait, toujours avivé par les stimulations de la publicité et des médias, une drogue dont le besoin, loin d'être comblé par l'abondance, se renouvelle et s'aiguise sans cesse.
La voie préconisée par l'Evangile pour trouver le bonheur |
Un test, réalisé récemment sur les quatre cents premières fortunes américaines par le magazine Forbes, montrait que les aspirations à l'enrichissement suivaient la courbe des fortunes. L'argent agit comme une drogue qui doit être administrée par dose de plus en plus fortes pour produire le même effet. C'est pourquoi l'un des inspirateurs de Tony Blair, Peter Mandelson, a pu parler d'une joyless growth, une croissance sans joie.
« Notre Foi dans ce siècle » de Michel ALBERT, Jean BOISSONNAT, Michel CAMDESSUS Ed. Arléa, 2002 page 113