samedi 9 novembre 2019

Abus sexuels et cléricalisme

Faire la vérité
" Nous, jésuites, encourageons les victimes à témoigner " La Compagnie de Jésus en France a publié, mercredi 3 juillet [2019], un appel dans lequel elle encourage les victimes de jésuites à se faire connaître de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église et de sa propre cellule d’écoute.
Son provincial le père François Boëdec explique en quoi ces témoignages sont importants, pour les victimes, pour l’Église et pour la Compagnie elle-même. (Relevé dans la Revue Etudes, avril 2019, article de Hervé Legrand) 

On revient de loin
Dans l’Eglise, les laïcs ne semblent jouir que des droits revenant à des citoyens étrangers, résidents et protégés ; les clercs seuls y jouissent de la pleine citoyenneté. Ce code [le Code de droit canonique de 1917, en vigueur depuis 1983].
Ce Code ignore le peuple de Dieu en son unité, car il ne connaît que des laïcs subordonnés en tout aux clercs qui leur sont supérieurs jusque dans la mort. Ce Code est le reflet fidèle de l’ecclésiologie de l’époque, tel que saint Pie X l’expose dans une encyclique adressée à l’Eglise de France :
« L’Eglise est par essence une société inégale, c’est-à-dire comprenant deux catégories de personnes, les pasteurs et le troupeau […]. Ces catégories sont tellement distinctes entre elles que, dans le camp pastoral, seuls résident et le droit et l’autorité nécessaire pour diriger les membres de la société ; quant à la multitude, elle n’a d’autres droits que celui de se laisser conduire et, troupeau docile, de suivre ses pasteurs. » (Revue Etudes, avril 2019, article de Hervé Legrand,

« Sur le plan de la foi, l’évêque est docteur. Le dialogue entre l’évêque et les laïcs chrétiens est certes possible, mais le laïc ne peut qu’être enseigné, que recevoir. Il est pris en charge par la hiérarchie. C’est un signe de comportement adulte que d’accepter sa condition » ibidem. (citation de « Masses ouvrières, janvier 1960, p. 7) 

Une Eglise avec un visage non de grandeur et de domination
« Il y a cent ans (1905), en France, l'Église s'est insurgée parce que le pouvoir politique allait l'obliger à être pauvre. Et cela s'est transformé en bien pour elle. Aujourd'hui l'Église qui, à nouveau, sous l'influence de Jean-Paul II, se voulait maîtresse de vérité et de morale, dans son désir de briller aux yeux des hommes par le retour aux pompes et aux ors, se trouve humiliée parce que son vrai visage se trouve rendu public, bien malgré elle. 
Cette situation, ressentie comme une humiliation ou une attaque démoniaque, peut se transformer en réelle humilité et permettre à l'Église de donner au monde un visage non de grandeur et domination, mais le visage du Christ au Jourdain et sur le chemin de la Croix. »
 (https://baptises.fr/content/je-ne-demande-pas-a-leglise-detre-parfaite) 

 « Le scandale de la pédophilie dans l’Église n’est pas qu’une crise de plus.
« Cette fois, la crise est intérieure. L’Église n’est pas attaquée par un ennemi extérieur. C’est le cœur même du système qui est touché » écrit Christine Pedotti (p. 111).
Quel est ce système ? C’est celui que l’Église a mis en place lors de
la contre-réforme et qui repose sur la personne du prêtre. Ainsi « tout tient sur le clergé… Les trois grandes fonctions de l’Église sont concentrées entre les mains des seuls prêtres de façon totalement exclusive. Ce sont eux qui célèbrent le culte, eux qui ont le privilège de l’enseignement et de la prédication, eux encore qui disposent de l’autorité, qui décident et gouvernent. Célébrer, enseigner, gouverner ; tout est dans les mains d’une minorité, hommes et célibataires, distingués du reste du peuple… » (p. 112). "Qu’avez-vous fait de Jésus ? – Lettre à ceux par qui le scandale est arrivé"
Par Christine Pedotti (Éd. Albin Michel, 2019, 180 pages, 15€)

dimanche 22 septembre 2019

A propos de l'Europe (avant les élections européennes)

UTOPIE "Il n'y a pas si longtemps, l'utopie aurait pu se décliner ainsi: les voitures intelligentes roulent sans conducteur, la pauvreté régresse de façon spectaculaire dans le monde, plus de la moitié des humains sont connectés, l'Union européenne élargie est devenue l'une des plus grandes puissances mondiales, l'Afrique est en face de développement spectaculaire, la Chine est l'un des partenaires économiques majeurs des Occidentaux, pratiquement toute la planète se retrouve pour la protection des grands défis du XXIe siècle, à commencer par la lutte contre le réchauffement climatique, etc." Nicole Gnesotto, "L'Europe indispensable" CNRS Editions  

 CAUCHEMAR
"Le cauchemar de son côté aurait pu ressembler à cela: la Chine et les Etats-Unis optent pour la confrontation, l'Europe se désintègre, la violence terroriste et étatique, les classes moyennes occidentales s'appauvrissent, les régimes autoritaires mettent à mal la démocratie, y compris l'Europe, l'Amérique fustige le système multilatérale qu'elle avait elle-même mis en place dans l'immédiat après-guerre, la vie privée n'existe plus et les données personnelles sont devenues les vraies marchandises du commerce numérique, le réchauffement climatique devient sans contrôle et met à risque des millions d'individus dans le monde, etc." ib p.7) 


Chute de l’URSS Lorsque l’URSS communiste disparaît en 1991, lorsque l’Allemagne se réunifie et que toutes les anciennes possessions occupées par l’empire soviétique se libèrent pour rejoindre les démocraties et les institutions européennes, c’est un autre monde qui s’installe sur les décombres de la guerre froide : la petite Europe des 12, solidaire, chrétienne, riche et prospère, totalement déconnectée du monde sous le protectorat des Etats-Unis, cette petite Europe idéale disparaît. Définitivement. (ib p.8) 

CHINE Simultanément, à l’autre bout du monde, une même frénésie de changement affecte le monde communiste : la Chine s’ouvre au marché et adopte le système d’économie libérale occidental. (ib p.8) 

 UNION MONETAIRE 
Zone euro: « la crise internationale de 2008, puis celle des dettes publiques en Europe ont mis au jour les défauts de fabrication de l’union monétaire. Et notamment l’absence d’un budget européen commun en face de la monnaie unique, qui aurait permis d’organiser un développement harmonieux de la zone euro, du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest. En outre les politiques budgétaires sont restées gérées au niveau national et elles ont également divergé car les pays n’ont pas respecté le ‘règlement intérieur’ du pacte de stabilité et de croissance. Les économies ont elles aussi vu se creuser de grands écarts de compétitivité, des coûts du travail, et de systèmes sociaux… » (Céline Schoen, dans LaCroix 9/5/19) 

 « La mondialisation
enrichit globalement le monde mais elle accroît les différentiels de richesse entre des gagnants et des perdants d’une part ; elle rapproche les individus, les réseaux, les modes de production et de consommation, autant qu’elle divise les Etats, oppose les références culturelles, exaspère les crispations identitaires, d’autre part. » Nicole Gnesotto, "L'Europe indispensable" CNRS Editions p.10)
« La peur de la paupérisation fait désormais partie intégrante du paysage politique européen, avec toutes les conséquences que l’on peut en déduire : nostalgie du passé et valorisation des nations, adhésion aux idéologies les plus radicales contre l’Europe, la mondialisation des élites, l’étranger, dénonciation de l’impuissance ou de la complicité d’une Union européenne oublieuse des peuples européens, etc. » (ib. p. 12) 
« elle (l’Europe) doit prendre en compte cette foule de citoyens que la mondialisation malmène, ou qui sont persuadés que leur destin est celui d’une paupérisation inévitable. » ib. p. 37 

 « La seconde contradiction 
est plus évidente car immédiatement visible : la mondialisation unifie la scène économique et financière, mais la mondialisation politique n’existe pas. Le marché est mondial, la politique est fragmentée. etc. » (ib. p. 12)  
« C’est cette absence d’unification politique par les marchés qui rend caducs tous les rêves de paix universelle et de conversion culturelle aux canons de l’Occident. » (ib. p 13)  
« C’est ce sentiment de vulnérabilité économique des classes moyennes, cette résistance identitaire face à face à la l’unification des modes de production et consommation qui suscite autant de volonté de reconquête des souverainetés. » (ib. p 14) (ib p.8)
« L’Europe ne s’est pas réformée, elle n’a pas compris d’ailleurs qu’il fallait se réformer très vite, et que la mondialisation galopante ne lui permettrait plus de fonctionner sereinement sur les mêmes bases. » ib. p. 36
« les citoyens découvrent soudainement que l’Europe de délivre plus la prospérité de naguère, tout comme l’OTAN a du mal à assurer la sécurité de tous. » ib. p. 36

Moyen Orient
 « Sans l’intervention américaine de 2003 contre l’Irak, déclenchée par George W. Bush et soutenue par le gouvernement de Tony Blair, le Moyen-Orient ne serait pas en effet dans l’état de décomposition qui le ravage aujourd’hui, pas plus que l’Iran ne serait devenue cette puissance qui inquiète. Daesh est né d’une crise politique en Irak et en Syrie et de la haine des islamistes intégristes contre l’Occident ? » (ib. p. 17) 

Les Européens et les Américains
« Les Européens ont sans aucun doute péché par excès d’optimisme à l’égard de la Russie post-soviétique. Par excès de suivisme à l’égard de leur allié américain. » (ib. p. 18) 
Le président Trump dénonce en effet le multilatéralisme sous toutes ses formes: retrait de la COOP21 sur la climat, critique de l’OMC avec blocage sur la nomination des juges de l’instance, sortie du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, retrait du traité de 2015 sur le nucléaire avec l’Iran, retrait du traité sur les Forces nucléaires intermédiaires (FNI). Ira-t-il jusqu’à mettre en cause l’OTAN?” ib. p. 40 
 “la construction d’une souveraineté européenne dans le monde ne peut se réduire à la seule dimension militaire. D’abord parce que beaucoup d’atteintes possibles à la sécurité des Européens ne sont pas des menaces militaires.” (exemples nombreux indiqués) ib. p. 40 

Immigration
« c’est l’étranger-musulman-assisté-social-accueilli-et-payé-par-l’Europe’ qui devient la cible privilégiée de la réaction souverainiste et identitaire. Et c’est l’Union européenne la coupable aux yeux de milliers d’Européens : coupable de l’ouverture des frontières économiques à la mondialisation et coupable de l’ouverture des frontières géographiques aux réfugiés et à toute la misère du monde. » ib. p. 18  
« Nous avons failli, collectivement, Etats membres et institutions européennes, dans la gestion des réfugiés. Nous avons failli également dans la prise ne compte des inégalités croissantes et des nouvelles vulnérabilités sociales qui accompagnent la mondialisation. Nous n’avons pas su voir, que sur la base d’une population européenne vieillissante et en diminution constante, périodiquement traumatisée par des violences terroristes imprévisibles, un duo infernal allait engendrer le pire des poisons : l’alliance entre l’austérité économique collective (les réformes structurelles) et le chacun pour soi politique (sur les réfugiés). ib. p. 43 

Démocratie
“Aurait-on jamais pensé, au début de la crise économique de 2008, que la démocratie pouvait être en danger en Europe? Evidemment non. A l’époque, juste avant la crise, l’euphorie était plutôt de mise […] Or, en une décénie, l’euphorie s’est renversée: la démocratie s’avère soluble dans la mondialisation et l’Union européenne, comme les Etats membres, ne sont pas des rocs intangibles.” ib. p. 42  


lundi 12 août 2019

LE BURKINA FASO présenté par le Père Jean Doamba


« Venez découvrir les richesses culturelles, spirituelles et humaines d’un pays situé au cœur de l’Afrique occidentale. »

Mercredi 21 août 2019

à la salle paroissiale 

à 20 heures



mardi 30 juillet 2019

Le Père Jean Doamba, chez nous cet été, se présente

LA SOUTANE ET LE MEDICAMENT

Je me nomme le Père Jean DOAMBA, originaire de l’archidiocèse de Ouagadougou (BURKINA FASO). Ordonné prêtre le 2 juillet 2005, je suis depuis le 2 juillet 2019  à la paroisse saint Jean XXIII de TARARE pour une mission d’été jusqu’au 12 septembre 2019.
Actuellement dans mon diocèse, je suis affecté dans l’hôpital Paul VI. J’y suis depuis octobre 2012.

L’hôpital Paul VI

Notre hôpital est une structure sanitaire appartenant à l’Archidiocèse de Ouagadougou. Il est le fruit de la générosité des chrétiens italiens suite à l’appel du Pape Paul VI lors du Congrès Eucharistique de PESCARA (1977). 
Depuis ce temps, la structure s’agrandit grâce à plusieurs facteurs (générosité des donateurs, la fréquentation des patients, sa notoriété grandissante et surtout l’amélioration de la gestion administrative et financière). Il compte actuellement 183 lits et le nombre d’agents est  481 dont 74 agents payés par l’Etat burkinabé.

Ma mission à l’hôpital

Après des études en la gestion pharmaceutique à l’Ecole Nationale de la Santé  Publique (ENSP), ma mission dans cette structure sanitaire se regroupe en trois rubriques  :
o Une animation spirituelle dans le centre hospitalier à côté de l’aumônier catholique  ; un programme de messes et de visite des malades catholiques est organisé.
o Une aide dans la gestion administrative et financière auprès de mes confrères prêtres. Nous sommes quatre prêtres à y travailler.
o Une gestion des consommables et produits pharmaceutiques pour le fonctionnement des différentes unités de soins et pour le dépôt pharmaceutique  : dans nos pays, il n’y a pas d’assurance médicale pour la majorité des Burkinabè. Chaque patient honore ses frais de consultation, de médicaments et d’hospitalisation. Ainsi notre mission consiste surtout à disponibilité les médicaments pour les patients qui fréquentent la structure.
Dans nos pays en voie de développement, les médicaments génériques ou les spécialités médicamenteuses sont toujours importés des firmes pharmaceutiques d’autres pays par des centrales d’achat nationales. La gestion consiste à rentrer en contact avec ses grossistes locaux pour trouver les consommables et les médicaments  ….tâche pas facile parce qu’il faut aller vite à la recherche de la qualité et de la quantité en fonction de la fréquentation de la structure.

La santé au Burkina

Le Burkina est un des pays en voie de développement et qui essaie par tous les moyens d’améliorer les conditions sanitaires de sa population  ; l’Eglise catholique qui a plusieurs vocations s’est engagée à côté de l’état pour combattre les maladies. Et elle compte toujours sur l’aide des personnes de bonnes volontés pour l’accomplissement de cette tâche. Car la majorité de la population ne bénéficie pas des assurances sanitaires comme en France.
Ainsi je vous prie de vous réjouir de cet acquis qui est trésor inestimable  : la santé n’a pas de prix mais a toujours un prix salé à payer pour les plus pauvres de nos pays.

Voici le site de l’hôpital Paul VI  : www.hopitalpaul6.org// www.cmapaul6.org
Mes contacts  : -  email  : doamjean@yahoo.fr
     -Téléphone ( France)  : 0605880638
                -Téléphone (Burkina Faso) 00226 70168602
Je traduis ma reconnaissance au diocèse de Lyon pour l’accueil et l’hospitalité.
Merci aussi à vous pour tout ce que vous ferez pour notre mission (prière, don de matériels et de consommables… ) au sein de cette structure hospitalière qu’est l’hôpital Paul VI.
Que Dieu vous bénisse abondamment  !


     

mercredi 10 avril 2019

Auvergne-Rhône-AlpesPuy-de-Dôme Puy-de-Dôme : sensibiliser les plus jeunes aux dangers d’internet

Internet et les réseaux sociaux sont devenus incontournables, notamment chez les plus jeunes, qui n'en maitrisent pas toujours les usages. Investigateur en cybercriminalité à la direction de la sureté publique du Puy-de-Dôme, Gilles portes fait de la prévention en la matière.

Afin de rassurer, mais surtout de sensibiliser les jeunes sur l’usage d’internet, Gilles Portes, investigateur en cybercriminalité à la Direction départementale de la sécurité publique du Puy-de-Dôme propose régulièrement des interventions dans les établissements scolaires. Car si aujourd’hui, tous les jeunes sont confrontés au net et aux réseaux sociaux, ils se lancent souvent sans avoir eu de mode d’emploi. Un constat qu’il déplore.
"C’est une formation qui se fait sans assez d’adultes qui les entourent. Souvent les parents sont dépassés et n’ont même pas conscience de ce qui se passe sur les réseaux sociaux. Je pense que malheureusement, ces générations apprennent dans la douleur ".

Ne jamais envoyer ses papiers d’identité,
ne jamais donner son adresse,
ne payer ses achats que via des transactions sécurisées… 


et surtout ne pas hésiter à alerter un adulte référent ou à même se rendre au commissariat en cas de danger: voilà les conseils que Gilles Portes délivre aux jeunes.
"Demandez-vous toujours si ce que vous faites sur internet, vous le feriez dans la vraie vie". Car sur internet, les cas de harcèlement et les arnaques sont nombreuses. Proies faciles, les jeunes se sentent alors pris au piège et ne savent pas toujours comment réagir.

Autre piège potentiel pour ces jeunes, l’addiction. Un piège qui là encore peut être évité en faisant simplement preuve de bon sens, comme le rappelle Gilles Portes : « Essayez d’avoir du recul et de vous déconnecter de temps en temps. Et demandez-vous toujours si tout ça a vraiment autant d’importance que ce que vous pensez ».

Article de Valérie Riffard relevé sur le site de Auvergne-Rhône-Alpes (Voir l'adresse ci-dessous)



 https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/puy-de-dome/puy-dome-sensibiliser-plus-jeunes-aux-dangers-internet-1652016.html#xtor=EPR-521

mercredi 3 avril 2019

Pour une Eglise de France sur ses deux pieds

« À la messe, changez de place, a indiqué mon curé comme effort de Carême. Ne hantez pas toujours le même bas-côté. » On voit le but : sortir des habitudes et faire mieux communauté. Pas si facile… et cependant, dans la crise ecclésiale actuelle, on peut penser qu’il faut aller plus loin : « changer de place », c’est poser également la question de la représentation du laïcat en France, dans sa mixité et sa pluralité, et examiner si rien ne pourrait être fait pour faciliter sa prise de parole et sa participation.

En effet, pour des raisons historiques et structurelles, ce n’est pas simplement la gouvernance, mais aussi l’expression et la représentativité de l’Église qui semblent cantonnées aujourd’hui dans l’orbe ecclésiastique. Inachevé en 1870 à cause de la guerre européenne, le concile Vatican I n’avait eu le temps que de renforcer le pouvoir centralisateur romain et la stature spirituelle du pape.

Non sans effets positifs, juste avant l’âge des sécularisations, des nationalismes et des totalitarismes : c’est parce qu’elle était plus reliée à Rome que jamais que l’Église de France put ainsi s’adapter assez aisément après 1905 à sa séparation d’avec L’État. Et les consciences ont bien souvent, depuis, trouvé réconfort et lumières dans l’aura et l’universalité pontificales.

Vatican II, un concile sans les laïcs


Le concile Vatican II, ensuite, vint aussi renforcer le pôle épiscopal. De 1962 à 1965, les pères conciliaires passèrent trois mois à Rome chaque année. Mais le clergé de base et le laïcat restèrent spectateurs de ce grand brainstorming : le Concile parla des laïcs… sans eux. Du côté du laïcat et de ses militances, cette position spectatrice fut certes contestée : il y eut de la surenchère réformatrice ou antiréformatrice jusqu’en 1975, puis vint la démobilisation. Lors des conciles précédents, les décisions ecclésiastiques avaient toujours rencontré des interfaces, parfois des contrepoids, dans la société : celles du concile de Trente au XVIe siècle avaient dû ainsi se faire « enregistrer » par les puissances laïques – princes, parlements, universités…



Mais le contexte nouveau de liberté religieuse en Occident permit aux pères de Vatican II d’achever le desserrement des liens avec l’État – précieuse liberté, qui laissait cependant l’institution ecclésiastique flottante et sans ancrage du côté du monde séculier. Tandis que l’institution des synodes et celle, en 1966, des conférences épiscopales augmentaient sensiblement la place des évêques dans la gouvernance générale, l’usure et le large démantèlement dans les années 1970 des divers mouvements de l’Action catholique achevaient de disperser tout laïcat organisé.

Par le baptême, « nous sommes l’Église »


Or, les failles et les ressentiments qui s’observent aujourd’hui l’attestent : l’économie actuelle de notre Église, à l’échelle nationale comme à celle diocésaine, souffre de cette organisation déséquilibrée. Par le baptême, « nous sommes l’Église » ; on nous l’a souvent répété au catéchisme : ce n’est pas l’Évangile seulement, c’est l’Église également, qui nous est trop précieuse pour que l’on puisse entièrement abandonner son souci et sa responsabilité aux seules institutions ecclésiastiques. Il faut dès lors réaménager des interfaces selon des modalités nouvelles.

Modalités nouvelles… sans être pourtant révolutionnaires ni bouleverser l’ecclésiologie communément partagée ; il existe par exemple en Allemagne depuis plus de cent cinquante ans une institution laïque dont nous n’avons pas l’équivalent en France et qui pourrait nous servir de guide : le « Comité central des catholiques allemands » (ZDK), qui représente le laïcat auprès de la Conférence épiscopale comme dans l’espace public. Ses origines remontent au milieu du XIXe siècle, lorsque la minorité catholique dut se défendre contre le Kulturkampf bismarckien. Le ZDK intervient dans les débats ecclésiaux, sociétaux ou œcuméniques et sert d’interlocuteur aux partis politiques.

Une structure qui a le mérite d’exister
Il organise les fameux Katholikentage, journées de réflexion qui réunissent plusieurs milliers de catholiques. En quête de représentativité, ses 230 membres des deux sexes sont désignés de trois manières : délégués des mouvements et œuvres catholiques ; délégués des laïcs membres des conseils diocésains ; personnalités qualifiées de la société civile et aptes au travail commun.

Ce n’est qu’une structure : elle n’est donc pas parfaite. Sa représentativité a parfois été contestée ; ses liens étroits avec l’épiscopat n’ont pas toujours empêché les déphasages ou les tensions. Ce n’est qu’une structure, guettée en tant que telle par la rigidité ou la bureaucratie – et ni à l’époque nazie où elle fut suspendue, ni face aux effets de la sécularisation, elle n’a fait de miracles. Ce n’est qu’une structure, mais elle a déjà le mérite d’exister. Sans préjuger ici des adaptations nécessaires, l’heure ne serait-elle pas venue de doter l’Église de France d’une institution comparable, pour qu’elle puisse un peu mieux marcher sur ses deux pieds ?
(article de Michel Fourcade paru dans le journal La Croix, le 1er avril 2019)


https://www.la-croix.com/Debats/Forum-et-debats/Eglise-France-deux-pieds-2019-04-01-1201012691

dimanche 3 mars 2019

Nouvelles congrégations religieuses au XIX° s.

 Dans ce sol de la vieille Europe chrétienne, tant labouré et arrosé par le sang des témoins sacrifiés, ce ne sont pas seulement les rejets des vieilles souches qui surgissent.  L'apparition de congrégations nouvelles est un des faits caractéristiques de la période : apparition? mieux, prolifération, saint pullulement, pléthore !
Il n'est pas une seule année, de 1815 à 1870, où l'on n'enregistre la naissance d'un de ces groupements, masculins et féminins, qui, sous un habit également neuf, selon des constitutions particulières, se dévouent au service de Dieu. 
Chez les femmes, le phénomène prend une telle ampleur qu'un mot malicieux courra: parmi les choses qu'en dépit de son omniscience le Bon Dieu ignore, il y a... le nombre des congrégations féminines. Ce mouvement est d'ailleurs encouragé par Rome, spécialement par le cardinal Bizzarri qui, sous Pie IX, dirige la Congrégation des religieux. 
Il faut l'avouer : il n'est pas commode de se repérer au milieu de toutes ces formations dont les désignations trop souvent se ressemblent. Hormis les spécialistes, bien peu de catholiques sont capables d'expliquer ce qui les distingue, moins encore de rattacher correctement une congrégation au nom de son fondateur.  Faire la différence entre des Marianistes, des Maristes, des Frères Maristes, des Oblats de Marie Immaculée, des Pères du Saint et Immaculé Coeur de Marie, n'est pas facile, et pas davantage de situer dans leurs justes perspectives les Sœurs de l'Assomption, les Petites Soeurs de l'Assomption, les Oblates de l'Assomption et les Orantes de l'Assomption ! D'autant que les vieux ordres suivent l'exemple: les Dominicaines finiront par avoir trente et une branches ou congrégations !


Signe d'individualisme que ce foisonnement de petites congrégations? 
Peut-être : mais aussi désir de répondre à des besoins accrus et diversifiés, par une spécialisation très poussée.  Ce qui n'empêche pas un grand nombre de ces fondations nouvelles d'être « pluralistes », à la fois, par exemple, enseignantes et charitables, comme l'ont été, depuis plus de deux siècles, les filles de Monsieur Vincent, sans oublier les vocations missionnaires, dont on a vu l'importance. 
Immense, impressionnante moisson pour Dieu, où les ouvriers et ouvrières affluent : la France en est alors le champ le plus fécond, mais suivie par l'Italie, la Belgique, l'Espagne et même les États-Unis et le Canada.  Un des aspects de l'Église de nos jours se prépare alors.

Chez les hommes,
les fondations nouvelles se constituent moins sur le modèle des grands Ordres anciens, que des Congrégations postérieures au Concile de Trente, et surtout des Compagnies de prêtres, formule souple et très favorable à une action multiforme.  Le terme d'Oblats est fréquemment utilisé, bien qu'il désigne souvent non pas, selon la définition, « des laïcs qui s'agrègent à une communauté religieuse en lui faisant abandon de leurs biens », mais de véritables religieux, ayant prononcé des voeux, ordinairement prêtres. 


Les Frères, leur multiplication
 A côté de ces formations, - autre fait caractéristique qu'on a déjà noté dans le domaine missionnaire, - surgissent et se multiplient celles des Frères, religieux qui ne sont pas prêtres, mais qui n'en servent pas moins Dieu et l'Église dans toutes les tâches apostoliques, selon la formule popularisée par saint Jean-Baptiste de la Salle: leur action, notamment en matière d'éducation, est de première importance. (…)
Certains se sont spécialisés dans la formule nouvelle des « patronages » qu'on a vus naître en 1845, avec les Fils de Saint-Vincent-de-Paul de l'abbé Le Prévost,  la grande majorité se consacrant à l'école et parmi eux une majorité de Frères :
Frères Maristes du P. Champagnat, Frères de l'Instruction chrétienne, dits de Ploërmel, du cher Jean-Marie de Lamennais, Frères du Sacré-Coeur du P. Coindre, Frères de la Doctrine chrétienne de Nancy, de Dom Fréchard, Clercs de Saint -Viateur, du P. Querbes, dont le succès au Canada sera considérable, et Frères des Écoles chrétiennes de la Miséricorde, et Frères de la Sainte-Famille de Belley, du Frère Gabriel Taborin, et Frères de Sainte-Croix-du-Mans, et Frères de Sainte-Croix-le-Rougé...
Turba Magna, eût dit l'abbé Bremond.  Encore faudrait-il ajouter ceux qui, s'occupant plus spécialement d'orphelinats, relèvent peut-être plus de la charité que de l'éducation.  Et encore faudrait-il ne pas oublier les Christian Brothers et les saint Patrick's Brothers d'Irlande, et surtout ceux qu'on verra en Italie naître à l'appel de deux des grands saints de l'époque, Joseph Cottolengo et Jean Bosco ! Parmi tant et tant de fondateurs, aux vertus éclatantes, et que l'Église a souvent reconnus, toute velléité de choix se décourage d'avance. 

On aimerait cependant en mettre à part un, en raison d'une intuition qu'il eut, remarquable : le P. d'Alzon (1810-1880) qui, en fondant ses Assomptionnistes (auxquels s'ajouteront plusieurs branches féminines), ne les orienta pas seulement vers l'enseignement et les missions en terres païennes mais leur proposa un des plus grands moyens d'apostolat du temps présent : la presse.


Chez les femmes, 


la complexité est encore plus grande, nombre des fondations ne dépassant pas le cadre d'un diocèse, voire d'une paroisse, et les désignations étant encore plus voisines les unes des autres.  Ce n'est pas à dire que les fondatrices et les fondateurs n'aient pas des individualités fortes, et bien différenciées : plusieurs apparaissent même comme des figures puissantes, et leur existence, que de nombreux livres nous font connaître, sont pleines de hautes leçons spirituelles.
(Daniel Rops, Histoire de l’Eglise Tome X, l’Eglise des Révolutions , Ed. Fayard  (Rops): p. 902 sq)


dimanche 24 février 2019

Jean Pierre Winter : La GPA,« une histoire vécue comme un abandon »

Jean-Pierre Winter, psychanalyste, s’inquiète de la chosification des enfants et des effets de la GPA sur leur épigénétique.


« La GPA est vécue par l’enfant comme un abandon. Quand il aura l’âge de poser la question “d’où viennent les bébés ?”, il va s’entendre dire, directement ou indirectement, qu’il a été pendant neuf mois dans le ventre d’une femme qui n’est pas celle qui s’occupe de lui, et qu’elle a décidé de l’abandonner. À un moment donné, l’enfant va nécessairement ressentir qu’il a fait l’objet d’un marché, qu’il est un produit avec une valeur marchande, et se demander : “Qu’est-ce que je vaux ?” 

Le rôle de l’épigénétique

Ce statut d’objet a quelque chose d’extrêmement humiliant. J’ai perçu ce sentiment chez des enfants nés de GPA, sauf qu’ils ne peuvent pas l’exprimer car il existe un interdit social de dire que les conditions de la conception peuvent être la cause du problème. Un jour, une petite fille que je voyais en consultation m’a demandé : “N’y a-t-il pas des moyens plus simples pour faire des bébés ?” Un enfant se compare à la façon dont les autres ont été conçus. Elle se sentait dans un statut de différence. Cela produit de la fixation sur l’origine.
On sait aujourd’hui, grâce à des études sur l’épigénétique ( Étude des régulations de l’activité des gènes), que le développement du cerveau du bébé dépend de la femme qui le porte et que les cellules fœtales restent dans le sang maternel pendant au moins vingt-sept ans. Or l’enfant né par GPA ne peut pas reconnaître sa mère d’intention ni par son odeur, ni par sa voix, ni par tout ce qui est lié à l’épigénétique. L’enfant sent qu’elle est une étrangère, exactement comme un enfant adopté à qui on n’a pas raconté son histoire le sait. Or, un enfant a besoin de savoir que la personne à qui il s’adresse est quelqu’un qui pense son existence, sinon il se sentira inexistant. »

https://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Ethique/Jean-Pierre-Winter-GPA-une-histoire-vecue-comme-abandon-2018-11-12-1200982587?from_univers=lacroix

dimanche 17 février 2019

Histoire de l'Eglise: Prêtres français aux Etats Unis au XIXe s.

L'implantation des Sulpiciens aux Etats-Unis devait être aussi décisive pour la jeune Église américaine qu'elle l'avait été pour l'Église canadienne au siècle précédent.  Bientôt ils furent douze.  Bientôt aussi ils furent rejoints par des prêtres que chassaient de France les mesures terroristes et de Saint-Domingue l'insurrection de Toussaint Louverture : au total une centaine de 1791 à 1815
La plupart de ces émigrés étaient des hommes de haute valeur morale et de culture.  Ils s'établirent un peu partout dans les territoires de l'Union et partout y firent de l'excellent travail.  Moins de vingt ans après la nomination épiscopale de Mgr Carroll, la situation du catholicisme aux U.S.A., était entièrement changée.  Et Rome, consacrant cet état de fait, créait en 1808 la Province ecclésiastique de Baltimore, dont l'archevêque avait quatre suffragants, New York, Philadelphie, Boston, Bardstown.


Ainsi, parmi les « Pères » de l'Église américaine figure un lot brillant de Français.  L'historien américain Théodore Maynard leur a attendu cet hommage :
« Il est difficile d'imaginer ce que serait devenue l'Église sans ces prêtres savants, vertueux, fort dévoués. »
Six accédèrent à l'épiscopat, laissant, là où ils travaillèrent, des noms illustres.  Plusieurs furent de véritables figures de légende. Tel Mgr de Cheverus, futur archevêque de Bordeaux et cardinal, dont la distinction et le charme firent beaucoup pour implanter le catholicisme à Boston, et en l'honneur de qui, lorsqu’arriva l'annonce de sa mort, les protestants eux-mêmes firent sonner le glas.  Ou l'étonnant Mgr Flaget, pionnier de l'Ouest, dont le premier palais épiscopal, à Bardstown, fut une cabane de rondins, dont la longue vie près de cent ans fut si féconde qu'on disait de lui que chacune de ses haltes apostoliques marquait l'emplacement d'un futur diocèse.  Ou encore Mgr Brutè de Rémus, surnommé «l’Ange du Mont », le plus savant de tous, qui, à cinquante-cinq ans, quitta ses livres pour partir, à deux pas des Peaux Rouges, arracher à la ruine la chrétienté de Vincennes et dont la fin de vie fut un tissu d'aventures. 
Leur action à tous porta ses fruits : à la mort de Mgr Carroll en 1815, les catholiques étaient 70 000 et il y avait soixante-douze prêtres américains.
(Daniel Rops, Histoire de l’Eglise Tome X, l’Eglise des Révolutions , Ed. Fayard )